Elle s’était rendue dans le District douze à la veille de la célébration du Printemps, un risque calculé, les Pacificateurs surveillaient les préparatifs sur la Grande Place, elle n’avait rien à craindre aujourd’hui et pourrait rendre visite à ces « amis » hébergeant son neveu en pleine journée. Aucun risque d’être dénoncée par les habitants de la Veine, sa famille avait été respectée et appréciée du temps où la paix régnait encore sur Panem : Owen avait fait profité les familles de la Veine de ses gains aux Jeux, quant à Rowan elle avait continué à chasser en grande quantité pour nourrir les familles les plus pauvres, sa sœur soignait les blessés, sa mère accouchait les femmes de mineur. Les Morgenstern étaient aimés et l’idylle entre Owen et Arabella n’avait fait que renforcer ces sentiments. La joie de Jace lorsque sa tante l’avait soulevée dans ses bras et lui avait offert une baleine taillée dans une pièce de bois avait réchauffée le cœur de la jeune fugitive. La vie dans les bois et l’inaction lui pesaient elle était las d’attendre et de veiller, Jace lui seul la retenait dans le 12. Elle aspirait à revoir les siens, sa mère, sa sœur et son frère dont elle restait sans nouvelles. Sébastian n’avait pas réussit à savoir où sa famille était détenu ou simplement à savoir s’ils étaient encore en vie. Il ne lui restait que Jace, elle ne pouvait pas l’abandonner. Pas maintenant. « Tu as maigris. » Rowan ne répondit pas à la jeune mère qui lui faisait face, se contentant de sourire en caressant le duvet de cheveux blonds de son neveu en l’écoutant babiller, tâchant d’oublier la douleur que provoquait le poids de son neveu sur les points qui resserraient les bords de sa blessure à l’abdomen. Oui, l’inactivité, la vie en ermite lui pesait, l’action lui manquait, elle ressentait le besoin d’agir. Bientôt elle devrait retourner dans les bois, quand reviendrait-elle visiter son neveu ? Elle ne pouvait le dire. Elle soupira et inspira le parfum de talc et de pois senteur qui émanait du petit garçon. Avec lui, elle se sentait chez elle.

« Mademoiselle Morgensten. » Elle n’avait pas baissé la garde, toujours est-il qu’il l’avait rattrapé. Perplexe elle contemplait ce visage autrefois ami. Dean McAllister. Meilleur ami, instructeur … Pacificateur, traitre. Ennemi. Deux fois en quinze jours un pacificateur mettait la main sur elle. Peut être avait-elle relâchée trop sa garde ? Peut être quelqu’un renseignait les Pacificateurs. Elle ne perdit pas le temps de discuter, de tenter de s’enfuir, de nier. Elle n’avait pas tant changé, lui non plus. Elle fit la seule chose qui lui semblait logique, elle tenta de survivre, de lui échapper. Son uniforme d’un blanc immaculé salit par endroit par la poussière de charbon se chargeait de lui rappeler que Dean n’était plus son ami mais, bel et bien son ennemi : un Pacificateur. Son poing vola en direction de son village, rapide, bien entendu, il le vit venir, n’avait-il pas été son « mentor », celui qui lui avait apprit la boxe et a casser proprement un nez ou des doigts. Mais, entre temps elle avait peaufiné sa technique, elle avait eut d’autres professeurs, aussi occupé à stopper son poing il ne vit pas son genou monté rapidement en direction de son entrejambe. Désormais, elle se battait aussi comme une fille. La prise sur son poing se desserra, il se plia en deux, le souffle coupé. Alors, elle profita de la diversion. Elle se mit à courir en direction du grillage. Elle courait comme jamais elle n’avait couru les pans de sa veste voltaient derrière elle. Elle courait car, il n’était plus des leurs, l’avait-il jamais été ? Il était un Pacificateur, elle était une fugitive. Elle l’avait comprit lorsqu’il avait cessé de répondre à ses lettres lorsque Galahad avait été choisi pour les jeux, il était des leurs. La faille dans le grillage lui apparut mais, il la talonnait de près. Elle savait qu’il ne la suivrait pas dans les bois. Il avait toujours refusé de s’y aventurer. Elle dérapa et se jeta la tête la première au travers de la faille, la grille bourdonnait légèrement et elle ne dû son salut qu’à la poigne de Dean qui se referma sur sa tresse et la tira en arrière. Mais n’aurait-elle pas préférée mourir libre que de devenir la prisonnière des Pacificateurs ? Le cuire chevelue douloureux, elle mordit la poussière lorsque déséquilibrée elle tomba sur le sol. Sa chance venait de tourner. Tandis que le genou du jeune homme se plantait dans son dos, l’immobilisant sur le sol, elle se permit une nouvelle bravade. « Fait ton travail, arrête moi, de toute façon je n’ai jamais rien représenté pour toi ! » Cracha t-elle.

Il ne s'attendait pas à ce que Rowan saute de joie à sa vue. Mais il ne s'était pas attendu à ce qu'elle se batte, non : il avait plutôt imaginé sa fuite. Il avait déjà tout vu dans sa tête. La jeune femme prenant ses jambes à son cou, courant le plus vite possible, mais lui la rattrapant et l'amenant en trophée à son chef d'escadron. Il aurait été acclamé pour sa prise. Et il aurait enfin eu ce qu'il avait tant rêvé, sa vengeance sur cette jeune femme qui allait à l'encontre de tout ce qu'il pensait idéal. Bien entendu, la voir se retourner le ramena bien en arrière, au temps où il habitait la Veine. Le temps où ils étaient amis. Leur grande différence d'âge n'avait posé que peu de problèmes à l'époque : il était courant que des jeunes d'âge éloigné traînent ensemble, sans que cela ait quelque chose de pervers. Heureusement. Les odeurs de cet endroit le renvoyaient à leurs après midi passées ensemble, jusqu'à ce que Rowan veuille aller au delà de la grille. Et il était toujours le seul à s'arrêter, à attendre. Cette pensée fit contracter sa mâchoire, et lorsqu'il vit Rowan faire un mouvement vers lui pour le frapper, le jeune homme bloqua le coup automatiquement. Ce qu'il n'avait pas prévu, c'était le coup de genou entre ses jambes. Elle frappa un endroit masculin qui ne put que lui couper le souffle, le faire se plier en deux. La douleur était monstre, mais il fit de son mieux pour ne pas paraître en souffrance. Cela faisait partie de son uniforme : paraître calme et en contrôle à tout instant. Seulement, il ne put s'empêcher de lancer un juron au passage, essayant de reprendre son souffle et d'oublier la douleur. Dean la vit partir. Il se précipita pour la poursuivre, voyant enfin le scénario imaginé se dérouler devant ses yeux. Il voyait les gens du district l'observer alors qu'il courait, essayant d'aller le plus vite possible. La détermination se lisait dans son regard : il n'arrêterait pas avant d'avoir ce qu'il voulait. Ce qu'il avait été idiot ! Lui adresser la parole, alors qu'il aurait pu l'arrêter, sur le champ ! Dean n'arrêtait pas de jurer intérieurement. Toutes les conditions réunies faisaient que sa course était un peu ralentie, et qu'il eut du mal à la rattraper. Suivant sa trace néanmoins, il se rendit compte bien vite qu'elle se dirigeait vers la grille.

Lorsqu'il la vit se jeter pour passer la grille électrifiée, il eut aussi peur pour elle que pour ce qu'il devait ramener aux pacificateurs. Ainsi, il avança la main pour prendre sa tresse et la tirer vers l'arrière, ce qui la fit tomber au sol. Rapidement, il se mit au dessus d'elle et la maintint au sol grâce à son genou. « Fait ton travail, arrête moi, de toute façon je n’ai jamais rien représenté pour toi ! » Il fronça les sourcils. Enfonçant son genou dans le dos de la jeune fille afin que cela la fasse souffrir un peu, il caressa sa natte et prit la parole. « Bien sûr, c'est toi qui n'a jamais rien représenté pour moi. C'est si facile de rejeter la faute sur les autres. » Il eut envie de lui cracher dessus, pour avoir osé dire une chose pareille. Mais, se retenant, il prit les bras de la jeune femme et les maintint en place derrière son dos. « Tu ne devrais pas faire la maline comme ça. J'ai le dessus sur toi et tu te feras sans doute exécuter. » Il fit de son mieux pour qu'un sourire sincère parcoure son visage. Seulement, il n'avait pas envie que Rowan meure. Lorsqu'il l'avait imaginé, l'idée le repoussait un peu. Maintenant, dans l'action, cela lui semblait également chose à ne pas faire pour rester sain d'esprit. Mais l'était-il ? Il avait perdu tous ses amis en devenant pacificateur, peut-être aussi son humanité. Finalement, en la tenant fermement, il la poussa à se lever et restant dos à elle, il tordit légèrement les poignets de la jeune femme pour qu'elle esquisse un rictus de douleur. Il lui suffit de pencher la tête pour murmurer à son oreille. « Tu préfères que ce soit moi qui te tue ? Ou .. » Sa voix semblait ne pas être la sienne. Il n'était pas comme certains pacificateurs : sans cœur, glacés. Il aurait du mal à tuer quelqu'un sans même prêter attention à son cas, sa cause. « Allez Rowan, je vais te lâcher. Mais ne t'enfuies pas. Je veux voir si tu arrives à me battre .. Si c'est le cas, je te laisserai partir. Marché conclu ? » Il ne lâcha pas encore les poignets de la jeune femme, attendant sa réponse.

"Alors Morgenstern, il est où ton amoureux ?" La petite fille se retourna brusquement les poings serrés. La bande de jeunes garçons faméliques qui lui bloquaient toute retraite la dévisageait des sourires goguenards sur les lèvres. Les poings de la petite fille se crispèrent provoquant le rire gras des adolescents qui lui faisait face. La traque durait depuis plusieurs semaines déjà, ils trouvaient toujours le moyen de l’intercepter lorsqu'elle rentrait de l'école, sans la compagnie de Galahad ou d'Owen. Elle n'avait rien dit à son frère de ce qui déroulait lorsqu'il se trouvait occupé ailleurs, avec la mort de leur père et de leur frère aîné d'autres problèmes bien plus graves nécessitaient son attention. Elle n'avait d'ailleurs jamais eut besoin de lui pour se défendre. Elle était une Morgenstern. Elle serait bientôt une chasseresse, Owen avait promis de l'emmener si elle s'améliorait à l'arc, elle s'entraînait chaque soir, perfectionnant sa technique, forçant ses muscles à un geste qui requérait plus de force que n'en possédait une enfant de neuf ans. Elle se devait d'être prête, de pouvoir assurer la subsistance de leur famille. Un jour il l’emmènerait avec lui comme le faisait autrefois leur père, avant l'éboulement. Elle voulait lui montrer qu'elle était capable de prendre soin d'elle-même, de leur famille. Pour cela elle avait passé sous silence les incidents qui l’avaient opposé aux "sbires" de Sebastian. Elle avait toujours réussit à leur échapper mais cette fois, elle ne pouvait fuir, il lui faudrait se battre. Elle leur fit face, serra les poings et la mâchoire. Elle était une Morgenstern. Elle redressa le menton et s'avança de quelques pas. "Dégagez de mon passage avant que je vous colle une raclée." Articula-t-elle froidement, l'air hautain, une vraie teigne. Il l'observait de loin, il ne pouvait percevoir ce qui se disait mais l'air bravache de la petite Morgenstern aurait fait reculer des garçons avec moins de tripes que ceux-ci. Soudainement, sans que quiconque lui prévu le poing serré de la petite s'écrasa sur un nez tandis que son pied heurtait un entrejambe. Rapide et agile la petite eu tôt fait de dominer la situation par ces "coups bas" pourtant elle récolta son lot de coups et accuserait de beaux hématomes le lendemain. Triomphante elle se dressa au-dessus de ses adversaires. "Qu'est-ce qui se passe ici ?" Les petites frappes qui se relevaient pour affronter la petite se figèrent et détalèrent sans demander leur reste en reconnaissant Dean. Alors, la petite s'autorisa une grimace de douleur et de grosses larmes se mirent à rouler sur ses joues tandis qu'elle dépliait ses pouces cassés. Elle s'était brisé les os en frappant sans protéger ses pouces à l'intérieur de ses paumes. Erreur du débutant classique mais, elle avait fuir les voyous, c'était tout à son honneur ils étaient plus grands et plus forts qu'elle. "Montre moi." Murmura-t-il en prenant ses paumes dans les siennes. Il grimaça face à la couleur pourpre de ses doigts et à leur gonflement inquiétant. "Cassés." Annonça-t-il. "Ton père ne t'as jamais appris à te défendre ? Ni Owen ?" La petite fille secoua la tête et essuya ses larmes, signe de faiblesse, et le dévisagea longuement. "Il est mort avant. Owen doit nourrir la famille. Je sais me battre." Une bravade à nouveau. "Erreur tu crois savoir te battre mais quand on se bat on se blesse pas soit même Rowy." Il avait raison bien sûr mais Rowan ne l'admettrait pas devant lui, elle était fière et courageuse, si marquée par la tragédie alors, ce jour-là leur amitié débuta par une phrase anodine. "Je t'apprendrais."


Pourquoi ne me réponds tu plus Dean ? Qu'est-ce que j'ai fait de mal ? J'ai besoin de toi, de tes lettres, de ta présence. Je ne supporte plus ce climat d'attente dans le District, je n'en peux plus de le voir combattre chaque jour sur cet écran, j'ai fait de lui un monstre, je lui ai fait promettre de revenir. Galahad tue pour moi, je le sais. Oh Dean... S'il te plaît parle-moi. Aide-moi. Comme lorsque je n'étais qu'une gamine en pleure avec les pouces brisés. Dean... S'il te plaît. J'ai besoin de toi.



Elle se débattit cherchant à lui échapper, feulant, griffant mais, il était plus fort qu'elle. Il lui avait épargné la mort pour la conduire lui-même sur le peloton d’exécution. Il n'était plus son ami, il l'avait abandonné, il l'avait laissé seul au pire moment de sa vie. Elle avait perdue Dean puis Galahad et ensuite Owen et Arabella. Il était l'un de ses seuls amis et il l'avait abandonné sans aucune explication, sans un mot. Il avait simplement cessé de lui répondre. Il l'avait oublié. "Allez Rowan, je vais te lâcher. Mais ne t'enfuies pas. Je veux voir si tu arrives à me battre .. Si c'est le cas, je te laisserai partir. Marché conclu ?" Elle se figea. "De toute façon je n'ai guère le choix." Marmonna-t-elle en se dégageant d'une secousse. Elle lui fit face, les poings levés comme il lui avait appris autrefois, pouces rentrés à l'intérieur des paumes. Le premier coup qu'elle lui envoya fut paré habilement, ils se tournaient autour, évaluant les failles, les forces et faiblesses de l'autre. "Tu m'as abandonnés. J'avais besoin de toi. Et ils te renvoient ici alors que je suis à nouveau vulnérable. Le Capitole a un drôle de sens de l'humour. Tu nous a tous trahis..."

Il se souvenait encore de leur première rencontre. Lorsque Rowan avait essayé de se défendre seule contre une bande de petites canailles, et que Dean était venu après la bataille pour ramasser la blessée. Ce jour là, elle s'était cassé les pouces rien qu'en frappant ses adversaires. Il était persuadé qu'à présent, cela ne se passerait plus. Merci les cours de boxe qu'il lui avait fournis, et bien sûr, le propre entraînement solitaire de la jeune femme. Il n'avait pas honte, de l'avoir abandonné de la sorte durant sa formation de pacificateur. Il n'avait pas honte d'avoir stoppé de répondre à ses lettres et de la laisser dans le doute, la torpeur peut-être. Dean ne regrettait rien. C'était une de ses nombreuses facultés : celle de ne pas se plonger dans le passé, et de ne se concentrer uniquement sur le futur. Cela formait sa détermination. Le fait était que, cette technique marchait infiniment bien avec lui, mais peu avec les autres. Ainsi, il pensait toujours à Rowan, et lui en voulait toujours d'être dans le camp adverse du sien. Tout aurait été plus simple si la jeune femme avait simplement décidé de soutenir les pacificateurs, le Capitole. Mais comment le faire ? Elle avait tant perdu à cause des jeux. Dean, lui, avait tout gagné grâce au gouvernement. Il s'était élevé des cendres pour devenir quelqu'un d'important, quelqu'un qui pourrait rendre les autres fiers. Il avait un peu de pouvoir, même si honnêtement, ce n'était pas ce qu'il recherchait. Le jeune homme voulait simplement rendre Panem meilleur, en protégeant au mieux ses citoyens. Et si protéger la masse voulait dire éliminer la menace, c'était ce qu'il ferait. C'était d'ailleurs ce qu'il faisait, en traquant Rowan dans le district. Il ne pouvait pas se permettre de la laisser en liberté, prêchant des « vérités » qui se révélaient être de vils mensonges. Rowan ne savait rien. Elle croyait savoir, et se baladait en se baignant dans sa propre ignorance. Au moins, Dean savait ce qu'il en était, ou en tout cas, c'était ce dont il était persuadé. Il savait pouvoir la battre dans n'importe quel combat. Plus tôt, elle l'avait pris par surprise, et avouons le, elle ne s'était pas battue très loyalement. Attaquer les parties génitales d'un homme était un coup bas, et il espérait que cela ne se reproduirait pas. Dean avait toujours mal et cela entravait ses mouvements de jambe. Dans cette position, lui derrière elle, la surplombant d'une dizaine de centimètres, il se sentait en contrôle. Il aimait cette sensation enivrante : celle de sentir les autres piégés dans son filet. Il disait les coincer là pour mieux les aider, pour qu'il ne leur arrive rien. D'autres fois, il appréciait juste le fait d'être supérieur et d'avoir cette toute puissance qui était jouissante. La sensation de pouvoir se glissait dans ses membres, et se frayait un chemin jusqu'à chaque extrémité, lui donnant une poussée d'adrénaline qui lui permettait de faire pratiquement n'importe quoi. Comme se comporter comme un macho cruel, ce qu'il n'était pas. ."De toute façon je n'ai guère le choix."  Elle se dégagea d'une secousse, après qu'il ait légèrement relâché la pression sur ses mains. Si il n'avait pas voulu qu'elle se libère, elle ne se serait pas délivré. C'était ainsi. Elle acceptait son petit marché et déjà, il trouvait sa position de combat. Les genoux légèrement fléchis, les poings parés. Dean avait l'avantage d'avoir une excellente coordination, ce qui palliait sa force non extraordinaire. Et Rowan lui envoya un premier coup, qu'il para de son avant bras. Il remarquait qu'elle s'était nettement amélioré, et mettait ça sur le compte des entraînements qu'elle avait dû continuer après qu'il fusse parti au district deux. "Tu m'as abandonnés. J'avais besoin de toi. Et ils te renvoient ici alors que je suis à nouveau vulnérable. Le Capitole a un drôle de sens de l'humour. Tu nous a tous trahis..."  Ses sourcils se froncèrent et ses poings se resserrèrent. Comme pour réagir à cette parole, il envoya un coup de pied en direction de Rowan qui fut trop rapide pour lui et l'évita. Il se remit en place en grognant et se déplaça un peu, sur un chemin de forme circulaire autour de la jeune fille. « Je n'ai trahi personne. J'ai toujours voulu devenir pacificateur et tu le sais .. Sois content pour ce but que j'ai atteint. Je ne peux pas te remercier pour ma réussite. » Elle aurait été la seule qui aurait pu le retenir vers le bas. Heureusement, cela n'était pas arrivé, et Dean restait dans sa position supérieure tandis que la jeune femme était toujours au même point qu'il y a dix ans. Les propos contre le Capitole lui firent l'effet d'un coup de poignard, et sa rage monta intérieurement. « Tu ne sais pas ce qui est bon pour toi, ce qui est bon pour Panem. Si tu arrêtais de te battre, si tu arrêtais de te cacher les yeux avec tes mains, tu verrais que tu fais tout pour empirer les choses. Le Capitole veut le bien de tous, et si tu capitulais,le tien aussi. » Rapidement, il courut vers Rowan et lui attrapa le bras pour lui tordre dans le dos, la tenant à sa merci. Quelques secondes plus tard, il la relâchait sans avoir fait le moindre dégât, si l'on ne comptait pas la douleur cuisante de l'échec que devait ressentir la jeune femme. La douleur à l'épaule et au coude était optionnelle. « Je vais te ramener, Rowy. Que tu le veuilles ou non. Fais attention à ce que tu veux : tiens-tu à la vie ? » Il avait utilisé le surnom affectueux qu'il lui avait donné, il y a tant d'années. Seulement, il lui semblait l'utiliser là uniquement dans un but cruel, pour lui rappeler que le passé était le passé, et qu'il n'y aurait plus aucun sentiment positif entre eux.

Elle aurait voulu le gifler, le griffer, l’injurier, pleurer, toutes ces choses que font normalement les femmes bafouées lorsqu’elles se retrouvent face à un ancien amant. Mais, Rowan n’était pas une jeune femme comme les autres, et Dean n’était pas son amant. Pourtant, elle ressentait ce besoin, au fond d’elle-même de hurler, de tempêter, de mordre et de griffer, d’agir comme une adolescente, d’agir comme une jeune fille, qu’elle n’avait jamais eu le temps d’être. Elle éprouvait le besoin de le faire souffrir, de faire tomber cette façade d’arrogance et de maitrise qui dissimulait si aisément ses pensées. Elle enviait son sang-froid, elle enviait sa maitrise. Il avait toujours réussit à la percer à jour, à la provoquer pour qu’elle sorte de sa réserve. Il la connaissait aussi bien qu’un frère, qu’un amant, qu’un ami. Dean McAllister était de retour dans le 12, et il était là pour elle, parce qu’on le lui avait ordonné, et comme un brave toutou du Capitole, il obéissait aux ordres. Il n’était plus question d’amitié entre eux, en avait-il d’ailleurs été question un jour ? Avait-elle eut une place dans sa vie ou tout ceci n’avait-il était qu’un jeu, un moyen de s’occuper jusqu’à ce que sa grande destinée ne lui ouvre les bras ? Elle avait perdue Galahad puis Dean et enfin Owen. Les trois hommes qui avaient le plus comptés dans sa vie, trois hommes qui chacun lui avait brisé le cœur, l’avait endurcie et fait-elle cette jeune femme solitaire et combative. Elle aurait dû le remercier. Grâce à lui, elle se sentait de taille à renverser le Capitole, a venger sa famille, les parents de Jace. Jace… Elle se battrait pour lui, qu’importe le prix à payer. Si elle devait tuer Dean, elle n’hésiterait pas, elle le savait. La vie d’un Pacificateur… Lui n’hésiterait pas à la livrer. Elle devait se battre et triompher pour survivre. Tel était le prix à payer pour assurer un meilleur avenir à Jace. Elle avait fait une promesse, celle de veiller sur Jace, au péril de sa vie, d’être une mère, une amie, une confidente, un exemple pour cet enfant. Rowan entendait honorer cette promesse. Il n’était plus le Dean qu’elle avait connu. Il n’était plus ce garçon qui lui avait appris à se défendre, ce garçon avec qui elle échangeait des lettres pour s’évader de son quotidien, ce garçon pour qui elle avait eu un léger béguin à neuf ans quand il était venu à son secours. Il n’était plus le petit Dean qui avait grandi dans la maison proche de la sienne. Ce gamin avec lequel ses frères avaient chahutés dans la poussière de charbon, il tenait plus du jeune homme qui leur faisait la moral lorsqu’ils s’aventuraient de l’autre côté de la grille. Ce garçon qui désapprouvait leur commerce à la Plaque. Un pacificateur. Elle avait toujours su qu’un jour il deviendrait un homme loyal, épris de justice et dont l’unique but serait de servir les siens. Leur vision de la justice, de l’honneur avait simplement divergé avec le temps. Elle vouait une haine farouche au Capitole, lui considérait cette instance comme source de paix et de justice. Le Capitole lui avait tout pris. Y compris Dean.

"Je n'ai trahi personne. J'ai toujours voulu devenir pacificateur et tu le sais… Sois content pour ce but que j'ai atteint. Je ne peux pas te remercier pour ma réussite." Un sourire sardonique effleura les lèvres de la jeune femme. Non, elle ne lui avait en rien facilité l’existence, elle défiant constamment les valeurs qu’il défendait. "Oh je suis fière de toi Dean… Mais pour quoi ? Pour servir un homme qui a assassiné les parents d’un enfant innocent ? Pour servir un système corrompu. Pour accompagner chaque année 24 enfants à la mort ? Oh je suis si fière de toi Dean. Vient dans mes bras." Le ton mordant, agressif de la jeune femme contredisait le sourire rayonnant qu’elle lui adressait. Elle ne le quittait pas des yeux et évita aisément son coup de pied, son sourire s’accentua. Elle n’était plus la gamine qui s’était brisée les pouces en se battant contre des petites brutes. "Je devrais aussi te remercier tant qu’on y est..." Elle lui expédia une série de coup de poing qu’il dévia, elle dansa autour de lui, sans trouver une faille dans sa garde, vigilante elle recula d’un pas. Mieux valait éviter d’entrer dans son champ. "Tu ne sais pas ce qui est bon pour toi, ce qui est bon pour Panem. Si tu arrêtais de te battre, si tu arrêtais de te cacher les yeux avec tes mains, tu verrais que tu fais tout pour empirer les choses. Le Capitole veut le bien de tous, et si tu capitulais, le tien aussi." Le sang bouillonna dans ses veines, un voile rouge se déposa sur ses yeux. "Le capitole veut notre bien ? Ils ont tués mon frère, ma belle-sœur, emmenés ma mère mon petit frère et ma sœur… Je ne me bats pas, je ne fomente aucune rébellion. Je ne suis qu’une fille contre des milliers. Une insignifiante gamine… alors pourquoi je représente une si « grande menace » pour le Capitole, si ce gouvernement est si juste ? Parce que ce n’est pas le cas." Lorsqu’il se saisit de ses poignets, remontant les bras dans son dos, l’immobilisant sous peine de se démettre une épaule en se débattant, elle se maudit pour être tombée dans le piège, avoir cédée à la rage. Rowy… Elle jura si fort que les corneilles perchées sur le toit d’une maison proche s’envolèrent. "Prends-moi, livre-moi. Cela ne changera rien au fait que le brasier a été allumée. Arabella a allumé l’étincelle. C’est le peuple qui s’embrase. Me tuer ne changerait rien. Je préférais mourir que de servir la cause du Capitole aussi aveuglément que toi. Tu es comme Snow. Corrompu. Comment a-t-on pu être amis un jour ? Comment as-tu pu oser être l'ami d'Owen et refuser d'aider sa soeur, son fils."

Dean croyait dur comme fer faire la bonne chose. Il ne s'était jamais vraiment questionné sur la nature du bien et du mal. On lui avait appris, ou plutôt, il avait voulu comprendre que le Capitole était le bien, et tous ceux qui s'opposaient à celui-ci, le mal. Son raisonnement était simpliste mais cela lui facilitait la vie. Cela lui permettait de se détacher de ses émotions et de ne pas penser à la fille qu'il connaissait jeune. Il ne voyait qu'une menace pour l'équilibre de la société, pour la paix. Rien d'autre. Rien d'autre ? Si. Il y avait une once de sentiments qui semblait grandir en lui, à chaque fois qu'il entendait sa voix encore une fois. Les souvenirs semblaient revenir dans son esprit pour se moquer de lui, pour lui montrer que tout cela n'était qu'un rêve. Qu'ils étaient encore amis, qu'ils étaient toujours en train de jouer dans la suie. Qu'ils boxaient, dans un coin reculé où personne ne pouvait les apercevoir. Qu'il l'accueillait avec un sourire lorsqu'elle revenait de la forêt, oubliant qu'elle venait de faire quelque chose d'illégal. Il se rappelait de leur amitié, de ce lien qui avait été si fort avant que Dean ne parte pour le district deux, apprendre à être un être froid et sans merci. Le Capitole l'avait changé, et il le savait. Pourtant, il s'évertuait à affirmer qu'il n'avait été changé qu'en mieux, et sûrement pas en toutou qui fait tout ce qu'on lui demande. Non. Il servait le Capitole ET ses propres idées. Dean aimait penser avoir une part de liberté dans tout ce système lorsqu'en vérité, de liberté, il n'y en avait aucune. C'était tout le principe du régime mis en place à Panem. On lui avait tout arraché, sans qu'il ne s'en rende compte : On l'avait privé de son honneur, de ses amis, de sa vie toute entière. Il dormait car le Capitole l'y autorisait, il mangeait la nourriture que le Capitole lui autorisait à manger. Sans le Capitole, il n'aurait plus rien. Sa personnalité avait été faite à partir de rien par les soldats déjà formés, et son physique cultivé avec l’entraînement. Dean avait peur, plus que tout, d'être privé du Capitole et de cette notion rassurante. Il savait qu'il y avait quelqu'un qui le protégeait, quelqu'un qui était là pour lui montrer le bien et le mal. Il savait qui il était, grâce à lui. S'il s'avérait qu'il perdait la foi dans le gouvernement, il mourrait. Il souffrirait tellement qu'il préférerait ne plus exister. Malheureusement, tout ne se passait pas comme prévu, et si le Capitole était toujours là, sa rencontre avec Rowan commençait déjà à faire reparaître un peu du vrai Dean. Il se sentait plus doux, plus indulgent. Il aurait pu l'emmener directement, la torturer, la faire souffrir. Et là, il .. jouait avec elle. Oui, tout ça n'était qu'un jeu.

"Oh je suis fière de toi Dean… Mais pour quoi ? Pour servir un homme qui a assassiné les parents d’un enfant innocent ? Pour servir un système corrompu. Pour accompagner chaque année 24 enfants à la mort ? Oh je suis si fière de toi Dean. Vient dans mes bras." Ses sourcils se froncèrent. Elle semblait fière de ce qu'elle avançait, comme si elle était absolument persuadée de la véracité de tous ses propos. « Ne comprends-tu pas que sans les jeux, ce serait le chaos ? Il y aurait beaucoup plus que 24 enfants innocents morts chaque année si les jeux n'existaient pas. Les districts oseraient se rebeller contre le Capitole, oublieraient tout ce que la rebellion leur avait coûté en premier lieu. Non. Les jeux sont essentiels pour la paix de Panem. » Il était sérieux. Sérieux comme il ne l'avait jamais été, essayant de combattre ses sentiments conflictuels pour la jeune femme en face de lui. Devait-il l'épargner ? Jamais. Il ne pourrait plus vivre avec lui même s'il la laissait filer. En même temps, il n'avait pas envie qu'on l'abatte devant lui, ou pire, qu'il soit celui à lui tirer une balle dans la tête. "Je devrais aussi te remercier tant qu’on y est..." Il rit, de ce rire qu'il avait construit pendant ces années loin du douze. Un rire à donner des frissons dans le dos, et qui n'avait rien de communicatif, au contraire. « Tu devrais. Sans le président Snow, sans les pacificateurs, sans les jeux, tu ne serais probablement pas en vie. » Les paroles semblaient fausses dans sa bouche, il commençait à s'en rendre compte. Pensait-il exactement tout ce qu'il disait ? .. Oui. Il y était obligé. C'était son avis, et pas celui qu'on lui avait inculqué à force de bourrage de crâne. "Le capitole veut notre bien ? Ils ont tués mon frère, ma belle-sœur, emmenés ma mère mon petit frère et ma sœur… Je ne me bats pas, je ne fomente aucune rébellion. Je ne suis qu’une fille contre des milliers. Une insignifiante gamine… alors pourquoi je représente une si « grande menace » pour le Capitole, si ce gouvernement est si juste ? Parce que ce n’est pas le cas." Il se repositionna en face de la jeune femme, en position de combat. Il lui laissa le temps de se remettre de sa douleur à l'épaule avant d'attaquer de ses poings. Elle évita quelques unes de ses attaques et riposta, jusqu'à le toucher au visage. Retenant un juron, le jeune homme se recula et essuya son nez qui, à présent, saignait. « Garce. Tu es stupide ! Ne sais-tu pas réfléchir par toi même ? Parfois, ce qui est bien et ce qui est en place est la même chose ! » Il pensait qu'elle faisait partie de ces gens qui n'étaient jamais contents avec ce qu'ils avaient, qui voulaient toujours du changement. "Prends-moi, livre-moi. Cela ne changera rien au fait que le brasier a été allumée. Arabella a allumé l’étincelle. C’est le peuple qui s’embrase. Me tuer ne changerait rien. Je préférais mourir que de servir la cause du Capitole aussi aveuglément que toi. Tu es comme Snow. Corrompu. Comment a-t-on pu être amis un jour ? Comment as-tu pu oser être l'ami d'Owen et refuser d'aider sa soeur, son fils." Reniflant, il se jeta sur Rowan et la fit tomber en arrière pour la plaquer au sol. Il se mit alors à califourchon sur elle, retenant ses pieds et ses mains au sol. J'ai été ton ami. Mais nos chemins ont divergé et à présent, je suis ton prédateur. C'est la vie. Il faut que tu l'acceptes, et que tu n'essaies pas de t'échapper car tu n'y arriveras pas. A partir du moment où tu as commencé à questionner le Capitole, tu es devenue une honte pour cette société. Il est nécessaire de t'éliminer. » Il sortit un couteau de sa poche et caressa la joue de Rowan. « Tu crois qu'ils veulent que je te livre aussi jolie que tu l'es maintenant, ou je peux m'amuser un peu avant ? » Il ne se reconnaissait plus. Il était devenu un autre homme un de ceux que le Capitole aurait adoré avoir. Un qui ne jurait que par le gouvernement, et qui arrivait à ajouter sa propre dose de cruauté à tout ce qu'il faisait. Une dose sûrement mortelle.

« Tu l’aimes. » Lentement Dean fronça les sourcils, une expression qui lui était familière, entre la désapprobation et la surprise, Owen lui adressa un sourire indulgent. Il n’avait posé aucune question, il savait que Dean était amoureux de Rowan. Elle n’était encore qu’une adolescente mais personne ne semblait pouvoir résister à la beauté cachée de sa jeune sœur, elle n’était en rien gracieuse ou douce telle que leur sœur Rebecca, elle était tout le contraire. Echevelée et souvent maculée de boue ou de suie, entêtée, arrogante parfois, imprudente et bravache. Mais, quelque chose chez elle amenait les gens à s’attacher, à graviter dans sa sphère d’influence, elle avait quelque chose de magnétique, d’animal. Il était son frère ainé et pourtant, il le remarquait. Rowan n’était plus la petite fille qu’il avait vu grandir, elle était devenue une femme, avec les courbes que cette transformation imposait mais aussi l’éveil du désir des hommes qui l’entourait, elle n’était plus considérée comme une enfant. Dans quelques années elle serait en âge de se marier, de fonder une famille à son tour et son pantalon en coton kaki et la chemise d’homme qu’elle portait ne pouvaient repousser les hommes indéfiniment. « Tu es amoureux d’elle. » Répéta Owen en dévisageant son vieil ami. Un fin sourire effleura les lèvres de l’ainée des Morgenstern. Rowan n’avait aucune idée de l’effet qu’elle provoquait sur les autres. Elle se considérait presque comme asexuée, à l’âge où les jeunes filles se consacrent aux premiers émois amoureux Rowan parcourait les bois à la recherche de gibier, à l’âge où les jeunes filles prennent soin d’elle, choisissent leurs vêtements en pensant aux garçons de leurs rêves, Rowan enfilait les vieux vêtements de son ainés qu’elle ajustait à l’aide d’une ceinture de corde qui maintenait le pantalon trop grand en place. Elle rentrait souvent maculée de boues, les cheveux ébouriffés et les joues rouges, grisée par le sentiment de liberté que procurait la course effrénée à travers les fourrées. Rowan Morgenstern, sa sœur cadette, une petite sœur qu’il devait protéger soudainement des assauts de la gente masculine, une première, si elle l’avait appris elle l’aurait surement allongée d’un bon crochet du droit, la petite pouvait se montrer susceptible. Il lut dans les yeux de son ami un reproche muet, comme s’il pensait qu’Owen l’enverrait sur les roses. « Je ne pense pas qu’elle soit trop bien pour toi Dean. Simplement qu’elle est bien trop jeune pour voir en toi plus qu’un grand frère. » Il posa une main calme sur l’épaule du jeune homme. « Je suis heureux qu’elle vous ait toi et Galahad si jamais mon nom est un jour tiré au sort… Vous saurez veiller sur elle, sur eux. Et un jour peut être te rendra-t-elle ce que tu lui as donné contre ton gré.»


« Ne comprends-tu pas que sans les jeux, ce serait le chaos ? Il y aurait beaucoup plus que 24 enfants innocents morts chaque année si les jeux n'existaient pas. Les districts oseraient se rebeller contre le Capitole, oublieraient tout ce que la rébellion leur avait coûté en premier lieu. Non. Les jeux sont essentiels pour la paix de Panem. » Les jeux essentiels pour la paix de Panem ? Si un regard avait pu tuer, Dean aurait été épinglé du premier coup. Son frère était mort dans l’Arène, une première fois psychiquement, le frère qui était partit ne lui était jamais revenu, sans sa rencontre avec Arabella, rien n’aurait pu ramener Owen parmi les siens, une part de lui était toujours dans l’Arène. Puis, il avait sacrifié sa vie pour sauver sa femme d’une mort imminente une seconde fois lors de l’Expiation. Les jeux n’étaient pas essentiels pour la paix… Les Jeux provoquaient la haine des citoyens de Panem envers le Capitole, les jeux étaient un moyen de rappeler aux habitants qui détenaient le pouvoir. Qui pouvait annihiler leur existence en une seconde. Les jeux étaient une barbarie, une aberration, un moyen pour régner par la terreur. « Sans les jeux tu ne serais probablement pas en vie. » Elle ressentit une immense jouissance en l’atteignant au visage, faisant saigner son nez, une piètre revanche qui apaisait le feu de la fureur qui la rongeait. Ce n’était pas après lui qu’elle ressentait de la haine, il n’était qu’un pion, qu’une marionnette répondant aux ordres de Snow, à travers lui c’était le Président qu’elle visait. Tout ceci était devenu personnel lorsque le corps sans vie de son frère avait touché le sol de l’arène 75. Elle ne pardonnerait jamais, elle n’oublierait pas. Jamais. « Garce. Tu es stupide ! Ne sais-tu pas réfléchir par toi-même ? Parfois, ce qui est bien et ce qui est en place est la même chose ! » Elle eut envie de le secouer, encore et encore jusqu’à ce que ce qui était brisé en lui se réassemble et qu’enfin il se rende compte de la réalité. Elle avait définitivement perdue le Dean d’autrefois. Il n’était plus qu’une marionnette entre les mains de Snow, un Pacificateur dévoué à la cause d’une nation pourrie par la corruption, la haine et la mégalomanie de son Dictateur. « Lequel de nous deux sert un homme et non pas un idéal. Je suis capable de réfléchir par moi-même. Je suis seule ici. Personne pour me dicter quoi penser et comment agir. La liberté, une notion que tu n’as jamais expérimentée… Par lâcheté. » Elle se retrouva rivée au sol, tel un papillon dont on aurait épinglés les ailes sur un tableau de liège. Il était plus fort qu’elle, il l’avait toujours été. Mais, elle se battrait jusqu’à la mort pour s’assurer que Jace serait toujours en sécurité. Elle préférait mourir sous sa lame que de pourrir dans une cellule de torture du capitole. Jamais elle ne serait la captive de qui que ce soit. « J'ai été ton ami. Mais nos chemins ont divergé et à présent, je suis ton prédateur. C'est la vie. Il faut que tu l'acceptes, et que tu n'essaies pas de t'échapper car tu n'y arriveras pas. A partir du moment où tu as commencé à questionner le Capitole, tu es devenue une honte pour cette société. Il est nécessaire de t'éliminer. » Etait-ce réellement le garçon qui lui avait appris à se défendre ? Qui avait soigné ses mains blessés, essuyés ses larmes de douleur et qui avait grandi auprès d’elle. Qui était cet étranger, cette brute sadique qui se tenait au-dessus d’elle et la menaçait d’une arme. Etait-ce un tel changement qui l’attendait si le Capitole la capturait ? Etait-ce ainsi que lui reviendrait son frère, sa sœur et sa mère ? « Tu crois qu'ils veulent que je te livre aussi jolie que tu l'es maintenant, ou je peux m'amuser un peu avant ? » Alors Rowan rua, par défi, par haine, pour protéger le souvenir de celui qui avait grandi avec elle. Dean devait se trouver quelque part sous cette couche de verni et de haine. « Je te faisais confiance ! Owen te faisais confiance ! » Cria-t-elle en gesticulant, tentant de se défaire de son emprise. « Prends ce que tu n’as jamais été capable de prendre… Vas-y… Je ne te l’aurais jamais donné librement… L’amour ! » La haine, la colère, la déception brillaient dans ses prunelles mordorées. Jamais elle ne saurait sienne. Jamais elle ne se soumettrait à lui. Jamais. Peut être n'était-elle pas si inconsciente de l'effet qu'elle provoquait... Peut-être l'avait-elle toujours su ?

S'il y avait un homme capable de ne pas ressentir, c'était Dean. Il avait appris, lors de ces années d’entraînement, à se bloquer de toute émotion. A ne pas pleurer à la mort d'un quelconque rebelle que l'on devait abattre. A ne pas s'énerver à la moindre provocation de la part des habitants des districts. Et ainsi, il s'était construit une carapace qu'il pensait indestructible. Chaque jour, celle-ci se renforçait à force de se rendre compte que personne ne tenait à lui, et personne ne le ferait jamais. Il fallait se rendre à l'évidence : Il n'avait pas d'amis. Il n'avait pas non plus de relation amoureuse d'une quelconque sorte, et n'en avait jamais eu. La seule personne dont il était tombé amoureux était Rowan, et à présent, elle était son ennemie. Il avait été idiot. Idiot de s'amouracher d'une fille beaucoup plus jeune, et qui n'aurait jamais été sienne. La différence n'était pas seulement dans les années les séparant. Mais dans leurs idées, au plus profond de leur nature, de leur esprit. Rowan ne serait jamais un soldat du Capitole, comme il l'était. Et penser qu'elle pourrait s'assagir pour devenir une bonne petite citoyenne était tout simplement une illusion. Peut-être qu'en venant ici, Dean avait pensé pouvoir mettre un peu de raison dans cette caboche, comme il aimait appeler la tête de Rowan auparavant. Mais cela n'aurait été qu'un rêve, qu'un but inatteignable. Tout comme il savait qu'il ne pourrait jamais se défaire de l'emprise du Capitole. On avait pris son âme, et on l'avait transformée. On y avait mis un émetteur qui contrôlait ses gestes, ses mouvements. Un Dean sain d'esprit ne se serait jamais comporté de manière si .. perverse devant Rowan : il l'aurait laissé s'échapper. Il aurait regardé à côté, et fait comme s'il ne l'avait pas vue. Mais le Capitole avait ce pouvoir, cette capacité de faire des personnes les plus bonnes des monstres. Est-ce que Dean était un monstre ? Non. Mais il en avait l'apparence. Tout ce qu'il disait, et faisait, donnait à croire que son âme était souillée et son esprit sadique et pervers. Ce n'était pas le cas. Mais on lui avait montré cela, alors il imitait. Cela ne lui avait jamais apporté de problèmes, heureusement. Il avait réussi à désactiver sa conscience dans les moments les plus durs, car s'il devait se sentir coupable pour chacun de ses meurtres et de ses actions, il n'arriverait pas à dormir, pas à vivre. Et il le faisait. Il faisait tout cela comme une marionnette, contrôlée par le pouvoir en charge à Panem. Une simple marionnette, à la tête creuse. Où était partie sa conscience, son esprit ? Lui même ne le savait pas. Mais peut-être suffisait-il de lui rappeler des temps passés pour le faire revenir, ou oser d'un peu de provocation. La vue de Rowan commençait à entailler la carapace qu'il s'était construit et, petit à petit, ses sentiments reparaissaient. De la rage. De la colère. Oui, que des sentiments négatifs pour l'instant, mais c'était déjà beaucoup.

« Lequel de nous deux sert un homme et non pas un idéal. Je suis capable de réfléchir par moi-même. Je suis seule ici. Personne pour me dicter quoi penser et comment agir. La liberté, une notion que tu n’as jamais expérimentée… Par lâcheté. » La liberté. Dean avait longtemps pensé que la liberté venait avec le pouvoir, et qu'à partir du moment où on avait ce dernier, on pouvait faire absolument tout. Mais petit à petit, en observant, il aurait pu se rendre compte que c'était l'inverse. Plus il grimpait, plus il semblait être contrôlé. Plus ses faits et gestes n'étaient pas les siens, mais ceux appartenant à quelqu'un d'autre. Ou à une simple image. Pouvait-il dire connaître personnellement le président Snow ? Non. Mais il pouvait pourtant affirmer agir pour ses idées, ses pensées, le bien de tous. Comment en être sur, au final. Sa prise se fit de moins en moins forte sur Rowan, mais quand même assez pour la maintenir au sol. Ses pensées allaient et venaient, et cela ne lui plaisait pas. Dean n'était pas habitué à autant réfléchir et surtout à ressentir. Ce que c'était fatiguant ! Les émotions jaillissaient comme une cascade qu'on aurait retenue avec un barrage depuis si longtemps. Cela coulait dans son corps, dans ses membres, le faisant frémir. Il avait envie d'extérioriser tout cela et la seule façon qu'il avait trouvé était l'agressivité. « Je te faisais confiance ! Owen te faisais confiance ! » Il la sentit gesticuler sous son corps et son visage se crispa, se retenant un quelconque geste mu par l'impulsivité qui l'habitait. Elle lui avait fait confiance. Et Owen .. Il n'était plus, à présent. Cette déclaration le prit par surprise, et la façon dont Rowan l'avait crié, l'émotion dans sa voix .. Dean était déstabilisé. Sa main droite trouva la joue de Rowan, pour qu'elle arrête d'agiter la tête. Et il l'observa dans les yeux, silencieusement. « Prends ce que tu n’as jamais été capable de prendre… Vas-y… Je ne te l’aurais jamais donné librement… L’amour ! » Ce fut un coup de trop. La douleur dans sa poitrine se fit plus forte jusqu'à le faire suffoquer. Sa respiration s'accéléra et rapidement, il se releva, laissant Rowan libre. Libre de s'échapper, de le laisser, de l'abandonner comme il le méritait. « Je n'ai jamais pensé mériter ton amour, Rowan. » Cette déclaration lui arracha un rictus étrange, et pour se donner de la contenance, il marcha un peu au loin et se mit dos à elle. « Tu peux partir. Tu peux courir, partir et ne plus jamais me revoir. Mais je suis fier de toi, Rowan. Car si je suis devenu ce que je suis aujourd'hui .. Tu es toujours égale à toi même. Et tu as quelque chose dont tu peux être fière. » Ses poings se serrèrent. Il eut envie de se griffer le bras, de s'arracher la peau, de voir le sang perler sur son bras.

Il se retourna. Et Rowan, aussi étrange que cela puisse paraître, était toujours là. Il s'approcha alors d'elle, les yeux brillants et humides, laissant une distance de sécurité mais montrant qu'il n'était pas en position d'attaque. « Je le sais ! Je le sais Rowy ! » cria-t-il. « Être pacificateur .. C'est la seule chose que j'ai. La seule chose dont je puisse être fier, moi. Je ne peux pas tout remettre en question. » Il accrocha sa propre main à son bras opposé, rentra ses griffes à l'intérieur de sa peau. La douleur l'apaisa, étrangement. « Je suis un monstre, mais je te laisse. Va. Et ne reviens plus. »

Le coup de poing qu'elle expédia dans le mur de sa chambre le l'apaisa pas, il ne fit que décupler sa fureur. Une rage qu'elle cultivait, tout lui était plus supportable que sa peur, son chagrin, son angoisse. La colère était une émotion si violente qu'elle emportait tout le reste, aussi cultivait-elle cette émotion avec l'espoir qu'elle chasserait les autres. Et seigneur qu'elle le haïssait en cet instant. Elle le haïssait plus que tout. "J'aime cette maison. En détruire les murs ne m'aidera en rien à me persuader de te laisser rester ici." La voix d'Owen la fit à peine tressaillir, elle savait qu'il était là, l'épiant, l'observant, jugeant son humour, son moral. Il était inquiet pour elle. Il était inquiet pour elle depuis qu'il l'avait trouvée dans les bois, seule, dévastée, anéantie par le rejet de celui qu'elle aimait. Elle avait repris goût à la vie ici, dans le quatre, où tout du moins donnait-elle agréablement la donne pour quiconque n'avait pas grandi à ses côtés. Il jaugea la situation d'un regard, les flammes dans la cheminée finissant de lécher les morceaux noircies d'une feuille de papier, les restes d'une enveloppe déchirée sur le sol. Dean. "Donne lui un peu de temps." Souffla-t-il en s'asseyant près de sa soeur sur le lit qui trônait au centre la pièce. Délicatement il passa une main dans la chevelure emmêlée de sa soeur, comme lorsqu'elle était enfant, il l'apaisait ainsi après la mort de leur père. "Du temps pour quoi ?" Demanda t-elle en se blottissant contre lui, bien malgré elle. Owen avait cet effet sur elle, auprès de lui elle redevenait sa petite soeur de sept ans, si faible, si jeune. Qu'il soit désormais le père d'un petit être qui avait besoin de lui ne changerait jamais le fait qu'elle était sa petite soeur. "Pour réparer son coeur brisé." Rowan se redressa et le toisa, soudainement sur ses gardes. Elle n'avait jamais été à l'aise avec sa féminité, avec ses relations avec les hommes. Il avait fallut que Galahad se prosterne devant elle, le coeur en bandoulière pour qu'elle remarque ses sentiments, des sentiments réciproque. "Il était amoureux de toi Rowan." Confessa son frère. "Laisse lui du temps pour encaisser ce qu'il a vu sur un écran. Celui que toi, tu aimes." Des larmes affluèrent aux paupières de la jeune. "Celui que j'aimais."

(...)

Doucement, elle avança la main, une main légèrement tremblante, incertaine. Comme un dresseur face à un animal sauvage, elle craignait une rebuffade, une morsure, une blessure de plus. Lentement elle posa la paume de sa main sur sa joue. "Tu ne peux pas me demander de m'en aller comme à un soldat sur lequel tu aurais de l'ascendant... Je ne suis plus la petite fille qui te dévorait des yeux en espérant un jour devenir aussi forte et assurée que tu l'était." Murmura-t-elle. Elle semblait avoir oublié où elle se trouvait, qui elle était, ce qu'elle représentait pour les habitants de tout Panem. "Je ne suis plus aussi innocente et tu n'es plus autant emplit d'idéaux justes et nobles. Nous avons grandis. Que je m'en aille ne changerait rien. Tu me retrouverais toujours." Ajouta-t-elle en caressant doucement sa joue, une caresse qui avait la légèreté d'une aille de papillon. Elle hésitait, elle attendait le moment où la haine resurgirait, on l'entrainement triompherait mais, c'était Dean qu'elle avait vu au fond de ses yeux, c'était à l'espoir qu'il fut encore que là qu'elle désirait se raccrocher. "Oui, tu me retrouvais. Il n'y a que deux personne au monde capable de cet exploit. Et les deux m'ont été arrachés par le Capitole." Elle se détourna, fuyant ce regard perçant, ses yeux trop bleus qui la fixait si intensément. "Tu as toujours mérité mon amour, tu n'aurais jamais pu me forcer à t'aimer, à être ton amie. Jamais. Le Capitole t'as changés... Le capitole m'a changé.... Le capitole nous a tous changé..." Que faisait-elle ? Pourquoi restait-elle près de lui ? Pourquoi ne profitait-elle pas de l’opportunité qu'il lui offrait. Elle devait fuir et non pas perdre du temps à vouloir le faire changer... Il était des leurs. Il avait choisi son camp des années auparavant. Tu ne peux pas lui faire confiance, il fait partit des Pacificateurs, ils l'ont envoyés ici pour toi. Pense à Jace, que lui arrivera-t-il si en lui accordant ta confiance ils remontent jusqu'au fils d'Arabella et d'Owen. Réfléchit bon sang. "Si je pars. Si je cours me réfugier dans les bois... Qu'est-ce qui t'arriveras Dean ?" Elle était lasse de perdre tout ceux auxquels elle tenait. Elle voulait que le Capitole lui rende ce qu'il lui avait prit. De gré ou de force.

Une légère brise se leva, et caressa lentement ses joues. Il ressentit des picotements au niveau du bras, endroit où il venait de s'enfoncer les ongles. Mais maintenant, il n'y prêtait plus attention. Dans cette tentative désespérée de sentir quelque chose, il crut enfin se libérer d'un poids. Il l'avait dit. Il ne s'était pas caché contre tant de phrases répétées mille fois dans sa tête. Il ne s'était pas caché derrière une cruauté qui n'était pas sienne. Non. Il avait fait face à ce qu'il ressentait et lui avait dit. Peut-être pas aussi directement qu'il les pensait, certes, mais c'était un début. Et au lieu de fuir, comme il pensait qu'elle allait faire, elle restait là. Plantée. Dieu, pourquoi ne partait-elle pas en courant ? Il lui donnait une opportunité en or. Lui même ne savait pas s'il serait capable de rester indulgent bien plus longtemps, et si son côté lunatique ne reprendrait pas le dessus. Qui sait, il trouverait sûrement dans une dizaine de minutes un quelconque intérêt à menotter la jeune femme et l'emmener au camp des pacificateurs. Mais pour l'instant, il lui semblait que sa carapace avait volé en éclats. Et il se retrouvait là, complètement nu, devant Rowan. Il avait froid. Il avait l'impression d'être un animal privé de sa coquille, ou que son cœur avait été sorti de sa poitrine et battait dans la main de la jeune femme, devant les yeux de tous. "Tu ne peux pas me demander de m'en aller comme à un soldat sur lequel tu aurais de l'ascendant... Je ne suis plus la petite fille qui te dévorait des yeux en espérant un jour devenir aussi forte et assurée que tu l'était." Ainsi, c'était comme ça qu'elle le voyait ? Dean parut surpris. Il ne s'était jamais demandé comment Rowan le voyait : à vrai dire, il avait toujours pensé qu'elle le prenait pour un rabat joie qui devrait se décoincer un peu plus. Même jeune, il voulait devenir pacificateur. Mais il aimait Rowan, et il lui avait appris à se battre pour qu'elle soit forte et puisse se défendre par elle même. Il avait réussi cette tâche, en quelque sorte. Il se maudissait seulement d'avoir arrêté en court de route, et d'être parti en formation au deux. Et là, il réalisa. Il sentait quelque chose de chaud, sur sa joue, et se rendit compte que Rowan avait mis sa main sur son visage. Ses cils battirent quelques fois d'affilée, rapidement, et ses paupières s'écarquillèrent légèrement. Ce contact était agréablement surprenant. Il n'osait bouger, et la fixais de ses grands yeux bleus, comme un animal qui vient de repérer son chasseur. Comme un animal qui se bloquerait, se figerait un instant, avant de partir. Seulement, il ne bougea pas.

"Je ne suis plus aussi innocente et tu n'es plus autant emplit d'idéaux justes et nobles. Nous avons grandis. Que je m'en aille ne changerait rien. Tu me retrouverais toujours." Dean en vint à se demander s'il pourrait vraiment vivre, s'il la savait morte. Ou s'il n'avait aucune idée d'où elle était, de ce qu'elle faisait. S'il .. abandonnait juste. Impossible. Il n'avait jamais cessé de penser à elle, même un petit peu de temps à autres. Il sentit la main de Rowan se mouvoir légèrement contre sa joue, et il posa sa propre main sur celle de Rowan, cherchant ce contact qui lui manquait tellement. Une vague de souvenirs l'attaqua et soudain, la chaleur de l'humain, les rires, même les pleurs, tout cela lui manqua. Il l'écouta parler, comme on écoute la chanson de sa mère avant de s'endormir. Sa respiration devint de plus en plus lente, son cœur ralentit les battements. Ainsi, il se sentait bercé par les paroles de Rowan, qui n'étaient pourtant pas joyeuses. Et quand elle posa sa question finale, il resta silencieux un moment. Il prit la main de Rowy positionnée sur sa joue et la serra, la forçant à l'enlever et à la baisser. Il entrelaça ses propres doigts entre ceux de la jeune femme. « Il ne m'arrivera rien, Rowan. Je suis déjà mort, tu le sais. » Il pensait ne pas pouvoir être sauvé. Il se sentait condamné. Condamné à être un soldat du Capitole jusqu'à la fin de sa vie, condamné à ne pas avoir de personnalité propre. « Je ne ressens plus rien, je .. ne suis plus le Dean que tu connaissais. Je n'ai jamais grandi, on m'a achevé avant. » Un soupir s'échappa de ses lèvres entrouvertes, et, relevant la main de Rowan, il l'amena à sa bouche pour y apposer un baiser. « Tu ne peux rien pour moi. » C'était ce qu'il pensait. Il se sentait désespéré, il se sentait irrécupérable. Pourtant, c'était faux. Mais la conviction était plus forte que la réalité, et ainsi, il se sentait happé dans un gouffre sans fond. Il lâcha finalement la main de Rowan et ferma les yeux. « Pars je t'en supplie. J'ai mal. J'ai perdu l'habitude de ressentir .. Tout ça, c'est trop pour moi. S'il te plaît, sois partie quand je rouvrirai les yeux. »

"Je ne veux pas te perdre une fois de plus Dean. Je suis lasse de laisser ceux à qui je tiens mettre enlevés." Elle soupira et fit un pas en arrière. Avait-elle le choix ? De toute façon elle ne pouvait l'entraîner à sa suite dans les bois. Il n'était pas de ses hommes qui renies leurs idéaux pour une femme, encore moins pour une amie d'enfance dont la vie se résumait désormais à défier l'autorité pour laquelle lui-même se battait. Un soupire lui échappa et elle fit un second pas en arrière. Elle devait s'en aller, elle ne devait qu'à la chance de ne pas avoir vu surgir une patrouille de Pacificateurs tandis qu'ils se bagarraient sur le sol poussiéreux de la Veine. La Grille n’émettait plus aucun grésillement significatif, il était temps pour elle de retourner à ce qui constituait sa vie. Pourtant, elle n'arrivait pas à s'arracher à son regard. Il y avait tant de l'enfant qu'il avait été, du garçon qui lui avait appris à se battre et qui l'avait épaulé lorsqu’Owen avait été envoyé aux Jeux. Sans Galahad et lui sa famille aurait été bien plus malmenée par cet épisode, Dean veillait sur son frère et sa soeur tandis que compagnie de Galahad, elle parcourait les bois pour se nourrir et compenser le "manque" de proie chassées par son frère aîné. Owen était à l'époque le meilleur chasseur d'eux trois, son départ avait creusé un vide dans leurs estomacs tout comme dans leurs bourses. Rowan avait dû prendre des tesserae pour subvenir aux besoins immédiats de sa famille. Il avait veillée sur elle une partie de sa vie. Elle ne pouvait pas l'abandonner alors qu'il semblait perdu, troublé, seul. Terriblement seul. Il pensait être un monstre, il pensait ne pas pouvoir être sauvé mais, si elle ne pouvait pas le sauver, comment sauverait-elle les autres ? Comment convaincrait-elle tout un pays de la suivre ? "Tu n'es pas mort. Je t'interdis de dire ça !" S'emporta-t-elle brusquement en revenant vers lui. La gifle qu'elle lui asséna les surpris tous les deux. Elle contempla sa paume rougie légèrement hagarde. Elle ne se battait pas ainsi, elle n'avait que très rarement réagit comme une fille. Plutôt que des gifles elle assénait des coup de poings. Elle ne discutait pas et frappait ensuite rien de moins. Elle venait de le gifler. Elle leva les yeux vers son visage, proche, et troublé et ses grands yeux bleus qui la fixaient, si vide, si désespérément vides. Il avait besoin de ressentir quelque chose. Elle ne pouvait pas le laisser si désespérément dépossédé de lui-même. "Il était amoureux de toi Rowan." La voix d’Owen résonna dans son esprit tandis qu'elle noyait ses grands yeux bleus dans ceux de son ami. "Fait lui ressentir quelque chose... N'importe quoi." Lui souffla son esprit, elle perdrait autrement... Elle perdrait cette étincelle qu'elle avait rallumée en lui. Sans se laisser le temps de réfléchir elle captura les lèvres son ami. Un baiser qui n'avait rien de prémédité. Elle voulait le retenir auprès d'elle, attiser la braise allumé en lui, elle voulait qu'il lui revienne. Le baiser prit fin brutalement, lorsque se rejetant en arrière elle fila par la brèche ouverte dans la Grille. Dean... c'était Dean qu'elle avait vu dans le regard perdu que le jeune homme lui avait jeté avant qu'elle ne fuis. Dean.

Spoiler:

"Je ne veux pas te perdre une fois de plus Dean. Je suis lasse de laisser ceux à qui je tiens mettre enlevés."  Les mots de Rowan résonnèrent dans ses oreilles de manière infinie. Il était quelqu'un à qui elle tenait, même après ce qu'il lui avait dit, même avec ce qu'elle savait qu'il avait fait. Personne n'aurait pu décrire le sentiment mêlé d'espoir et de gratitude qui s'éleva dans son être, et même lui avait du mal à s'y retrouver. Son torse se soulevait régulièrement et de manière visible, à cause de sa respiration audible et plus accentuée que d'habitude. Il ne se sentait pas bien, il se sentait tomber. Rowan était la seule à la retenir, avec sa seule main, pour qu'il ne se perde pas aux fins fonds du gouffre sans fond. Il lui avait donné l'occasion de s'enfuir et elle ne l'avait pas pris, non. Elle avait décidé de rester à ses côtés car elle pensait qu'il était encore là, le Dean qu'elle connaissait. Lui aussi avait envie de le croire, il avait envie de le croire plus que tout. Mais pouvait-on changer si radicalement à un moment aussi avancé de sa vie ? Vingt huit ans étaient passés et il avait cru qu'il ne changerait plus jamais. S'était-il trompé ? Cette même possibilité l'effrayait. "Tu n'es pas mort. Je t'interdis de dire ça !" Elle le gifla. Il ne put que l'observer sans rien dire, surpris mais également confus, si confus. Était-elle en colère contre lui ? Était-elle frustrée ? Parce qu'il était un cas irrécupérable et qu'il n'y avait rien qui pourrait changer cette situation ? Lentement mais sûrement, les sentiments qui s'étaient relevés en lui s'affaiblirent. Il retomberait bientôt dans le passif, dans cet état de zombie dans lequel il habitait la plupart du temps. Et Rowan semblait chercher, chercher quoi, il n'en savait rien. Ce n'est que lorsqu'elle s'approcha de lui qu'il se sentit happé par une foule de sensations et de sentiments. Lorsqu'elle posa ses lèvres sur celles de Dean, il resta les yeux ouverts, ne comprenant pas ce qu'il venait de se passer. Rowan. Rowan venait de l'embrasser. Mais il comprenait son désir, il comprenait pourquoi elle faisait cela : ce n'était pas une manifestation d'un amour qu'il avait recherché autrefois. Elle essayait de le faire sentir, de le faire ressentir. Et cela marcha, au moins pour un petit temps. Lorsqu'elle était encore collée à ses lèvres, il sentit des fourmillements lui passer dans le corps, son cœur s'accélérer. De douces sensations, des sentiments plus bestiaux, plus passionnés. Et puis le contact s'arrêta, et il observa d'un regard voilé la jeune femme se glisser dans la brèche de la grille. Dean resta immobile. Comme pour s'assurer de la véracité des évènements qui venaient de se passer, il toucha ses propres lèvres doucement et se rappela du contact que celles de Rowan eurent sur les siennes. Un léger sourire voulut se frayer un passage sur son visage, mais il réussit à le contrôler. Et si elle n'avait fait que le manipuler pour qu'il ne l'arrête pas ? Et si elle se fichait totalement de son état, de ce qu'il était, de ce qu'il pouvait devenir ? Malgré ces pensées, il restait quelque chose à l'intérieur de Dean. Une étincelle. Une étincelle d'espoir, qui pourrait bientôt enflammer son esprit.