CITOYEN DE PANEM | Sujet: another boring day // free Lun 23 Avr - 16:27 | | | « Est-ce que je peux te laisser les clés de la boutique pendant une heure ou deux Minnie ? Malcolm vient de m’annoncer que mon fils vient de chuter d’un pommier et … » « Oui oui, il n’y a pas de soucis. Prenez votre temps … je vais tout gérer. » Cette situation, je l’avais déjà vécue. Il y a deux ans. J’étais encore étudiante à l’époque : en plein cours d’histoire, lorsque ma voisine est entrée dans la salle, a chuchoté quelques mots au professeur qui s’occupait de nous, avant de me demander de prendre mes affaires et de l’accompagner. Tout de suite, j’avais imaginé le pire. Quelques semaines plus tôt, la voisine de Chloé Manning avait fait irruption de la même façon, et l’avait emmené avec elle. On avait appris le lendemain que son frère aîné avait été surpris en train de voler des pommes dans un verger, un pacificateur l’avait surprit, l’avait traîné sur la grand’Place du village et fouetté en public, comme le voulait la « tradition » dans le 11, pour bien faire comprendre aux habitants que même si nous sommes un des trois fournisseurs de nourriture de Panem, ce n’est pas ce qui nous permet de nous servir comme si les champs et les vergers nous appartenaient. Tout appartient au Capitole, même la ferme de mes cousins. On meurt rarement d’une flagellation en publique, l’égo en prend un coup, et le plus embêtant, c’est de ne pas pouvoir travailler pendant que les traces de coups guérissent. Malheureusement, les plaies du frère de Chloé se sont infectées et il est décédé au bout d’une semaine. Elle n’est plus revenue en classe, ses parents ont du la faire travailler pour en quelque sorte remplacer son frère, et qu’ils ne meurent pas de faim. J’avais trouvé cette histoire horrible. C’est pour ça que quand cette voisine était venue me chercher, j’avais imaginé le pire. Mais pour une fois, j’avais eu tord. Mon père avait « juste » fait une mauvaise chute alors qu’il avait grimpé dans un arbre pour cueillir des cerises. La branche sur laquelle il était assis avait cédé sous son poids, et il était tombé sur sa cheville, qui s’était cassée. Rien de grave. Juste de longues semaines d’immobilisation pendant que les os se ressouderaient. Pendant lesquelles je m’étais forcée à aider les trieuses de fruit pour me faire un peu d’argent et pouvoir nous acheter de quoi manger. C’est aussi à ce moment que j’avais décidé ne pas vouloir travailler dans les champs quitte à devoir prendre des tesseraes supplémentaires. Mon père n’avait pas aimé ma décision, mais étant fille unique, il me passait tous mes « caprices ».
Mme Donner, la mercière, était partie depuis déjà une bonne demi-heure, et par chance, personne n’était passé à la boutique depuis. Par chance, car même si j’étais tout à fait capable de me servir de l’antique caisse enregistreuse et étant au courant des échanges qu’elle acceptait, j’étais incapable de repriser correctement des accros, ou de faire des ourlets, ce qu’elle faisait en moins de dix minutes. J’étais assise sur un tabouret, dans un coin de la boutique, un vieux morceaux de toile de jute entre les doigts. Pour m’occuper, j’avais saisi une grosse aiguille et du fil de laine, le moins cher, pour m’entrainer à faire quelques points basique, que « même la plus maladroite des jeunes filles devrait pouvoir maitriser sans problèmes ». C’était plus facile à dire qu’à faire mais après des jours d’entrainement, le résultat semblait de plus en plus acceptable à mes yeux. Elle avait déjà évoqué le fait qu’elle pensait à m’envoyer en formation au district 8, celui du textile, pour une dernière tentative de m’apprendre à coudre. Je me suis bien gardée de dire que ça pourrait être intéressant, mais que je préférerai aller au un pour ramener des joyaux qui orneraient de jolies robes. La cloche de la porte d’entrée tinta, je relevais la tête, et déposait mon bout de tissus sur le tabouret où j’étais assise encore quelque secondes plus tôt. Tout en allant vers le comptoir, je lissais ma jupe, un peu froissée de la position assisse prolongée. Mes lèvres formèrent un grand sourire. « Bienvenue dans la mercerie de Louve Donner, que puis-je faire pour vous ? »
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